Une procédure pour comprendre le workflow (partie 2)

Depuis quelques années, le langage technique audiovisuel s’est largement enrichi d’une terminologie anglophone que nous avons parfois grand-peine à maîtriser. Avec la généralisation du numérique, on parle désormais de Workflow, mediaflow et dataflow. Poursuivons notre propos...*
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Le workflow constitue un registre de compréhension fondamental abordable, mais il ne fournit aucune précision sur la nature et les caractéristiques des médias, ni sur les données qui transmettent des informations détaillées sur les conditions de capture du média (qu’il soit brut ou élaboré par un processus de postproduction d’un contenu finalisé).

Aujourd’hui, tous les appareils de prises de vues numériques génèrent des jeux de métadonnées. Pour la vidéo professionnelle, des champs personnalisés éditables permettent d’étendre le catalogue des renseignements portés par les fichiers médias. Décrivant les tâches opérationnelles, le workflow est la procédure qui incombe à l’utilisateur (grand public) ou aux métiers opérateurs (professionnels) ; une procédure qui met à l’épreuve leurs capacités de mémorisation, de compréhension, d’appréciation et de décision pour s’adapter à une situation présente.

 

Des procédures automatisées

Lorsque l’on est en mesure de constituer la liste exhaustive de toutes les variantes de la situation et de détecter des indicateurs pertinents qui fixent les conditions d’un exercice dans un environnement numérique, on est en bonne voie pour une démarche d’automatisation de la procédure. Comme pour les appareils de prises de vues avec des réglages automatiques et quasi-instantanés de netteté, de balance des couleurs et d’exposition.

Des systèmes intelligents, dits workflow-systems sont désormais capables d’automatiser des procédures techniques complexes et de soulager les utilisateurs, ou les professionnels concernés, du poids d’importantes charges de travail répétitif et sans véritable valeur humaine ajoutée. Pour tous les types d’équipements, les systèmes à commandes vocales seront une importante piste de développement pour qu’un opérateur puisse automatiser un processus simple ; mais ces systèmes de transcription vocale mettent plus de temps que prévu pour être mis au point.

Dans l’industrie, d’autres systèmes sophistiqués sont intégrés dans les environnements des systèmes d’information et de gestion des médias en flux. Ils permettent de modéliser, à l’aide d’un éditeur graphique, les étapes séquentielles et les liens conditionnels entre ces étapes, pour scénariser toutes les variantes d’un processus quand il est maîtrisé par un gestionnaire expert.

Ce type de processus automatisé assure notamment la fabrication automatique des multiples déclinaisons en fichiers, codés sous divers procédés pour les programmes finalisés. C’est une problématique à laquelle sont confrontés les éditeurs de programmes qui doivent alimenter les différents circuits de distribution en visionnage linéaire ou à la demande. La mise en œuvre d’un workflow-system a pour but d’automatiser, en partie ou intégralement, les différents processus de traitements des médias et des données, absorbant le workflow puisque les tâches opérationnelles sont supprimées.

 

L’importance de bien nommer les choses

Dans un marché d’équipement caractérisé par l’évolution rapide, continue et profonde des technologies numériques, c’est une masse de connaissances nouvelles qui se déverse sur les acteurs de l’audiovisuel, amateurs comme professionnels. Ils n’y sont pas toujours bien préparés. Les écoles et centres de formation spécialisés remplissent une mission bien délicate en préparant les esprits à cet exercice de confrontation avec l’immatérialité et les concepts de l’audiovisuel numérique.

Si le vocabulaire spécialisé n’est qu’un outil au service de la professionnalisation de l’individu, sa maîtrise est à coup sûr une clé de succès, pour comprendre et se faire comprendre, en toutes circonstances. Pratique dommageable, la négligence à son égard peut se résumer par la périphrase : « Mal nommer les choses du numérique, c’est ajouter aux petits malheurs du monde moderne des médias… » (les lecteurs les plus littéraires auront reconnu l’inspiration d’une citation d’Albert Camus).

C’est aussi une tendance fâcheuse qui laisse la place au doute et à la confusion dans l’esprit de ceux qui se préoccupent de la production d’images ou de sons, en mettant leur technicité au service de la communication. Pour le technicien spécialisé exerçant un métier exigeant dans le domaine de la production audiovisuelle, ou pour l’utilisateur anonyme attentif et intéressé par les technologies numériques créatives, les difficultés rencontrées dans la confrontation aux technologies sont de même nature. Elles sont aussi tributaires de la qualité des échanges entre les individus et du bon emploi des mots, qui font progresser connaissances et savoir-faire. Ce qui appelle une autre citation de circonstance, dans sa version originale de Nicolas Boileau-Despréaux, en guise de résumé plutôt que de conclusion : « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément ».

 

* La Partie 1 de cet article, paru pour la première fois dans Sonovision #4, pp. 62-63, est accessible ici. Soyez parmi les premiers à recevoir dès sa sortie notre magazine papier en vous abonnant ici